Quel plaisir indicible ai-je ressenti à la lecture de ce court récit. Nouvelle rencontre étonnante avec Stephen Zweig. La première remonte à une quinzaine d’années maintenant lorsque je me suis plongée avec délice dans la biographie de Marie Stuart. En sus des éléments historiques, Zweig y faisait une analyse impeccable et fine de la psychologie de cette reine d’ Ecosse à la destinée tragique, dotée d’un caractère ardent et impulsif.
Y aurait-il eu par hasard une femme qui sommeillait en Zweig pour que ce génie de l’écriture arrive à ce point à parler de la gent féminine avec autant de justesse et d’émotion? C’est simple à la lecture de ses œuvres on en arrive à épouser le personnage, à ressentir ses troubles et sa tristesse face à l’abandon et l’échec, ses battements de cœur et son élan euphorique face à l’être aimé ou à l’objet du désir, sa colère et son désarroi face à la bêtise humaine et la trahison.
Chose incroyable, j’ai même ressenti à moment donné une sensation de pluie battante et glaciale me parcourant comme un frisson lors d’une scène ou l’héroïne se retrouve dehors à défier les éléments pour tenter de sauver celui qui se trouve être déjà condamné (mais elle l’apprendra plus tard à ses dépens).
L’histoire se déroule dans une pension au début du 20ème siècle. Une femme de trente-trois ans quitte mari et enfants pour partir avec un séduisant jeune-homme qu’elle vient à peine de rencontrer. S’ensuit des discussions agressives entre pensionnaires dans une Angleterre puritaine où la chose est tout bonnement inconcevable.
Mrs C., aristocrate bien née, comme pour justifier l’acte de cette femme soumise à l’opprobre, nous embarque alors dans un récit passionné des vingt-quatre heures les plus marquantes de son existence. Heures qui par leur intensité réussiront à éclipser toutes les autres d’une vie a priori comblée.
Ici la magie de l’écriture opère. Stephen Zweig va nous parler dans un style d’une limpidité incroyable d’une chose pourtant difficile à cerner, à savoir la passion. Celle qui brûle les âmes et détruit les cœurs. La passion de l’amour mais aussi la passion du jeu. La passion sous toutes ses formes avec tout ce qu’elle contient d’absurde, d’incohérent et d’imprévisible.
Un petit chef d’œuvre de littérature à dévorer avec…passion.
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