Trop novateur, trop transgressif, trop frontal et frondeur pour son époque, boudé par le succès durant sa brève existence (1965 à 1970), comment le Velvet Underground s’est-il progressivement révélé jusqu’à devenir une légende rock par excellence? De Bowie à Cobain, toute une génération d’artistes de talent succombèrent aux sons d’une guitare et d’une basse « palpitantes et sarcastiques ». « Ravissement. L’une après l’autre, les chansons tortillaient et faufilaient leurs tentacules autour de mon esprit » dira l’inventeur de Ziggy Stardust. Quelque chose de sexuel, de maléfique, de dissonant mais d’hypnotique, de décadent mais d’envoûtant se dégage de ces mélodies complexes presque irréelles.
A l’origine, la rencontre improbable de Lou Reed et John Cale que tout semble opposer sauf la fascination pour le rock’n’roll naissant et un attrait prononcé pour les expériences borderline. Et puis une ville. New York. Le New York interlope du début des sixties où l’élite des artistes décide que tout est permis. Autour du poète rockeur et du musicien d’avant-garde s’agrège alors une équipe de francs tireurs : Sterling Morrisson, Moe Tucker et Nico – iceberg blond à la voix caverneuse tout droit sortie de la Dolce Vita – dont Andy Warhol va faire un temps la chanteuse du groupe. Un joli cocktail détonnant qui pourtant ne tiendra pas le coup très longtemps mais marquera le monde musical de son empreinte.
De la rue aux plus hautes sphères de la société new-yorkaise, de l’univers de la musique pop à celui du cinéma, de la peinture à la littérature, l’exposition « The Velvet Underground – New York Extravaganza » qui s’est installée à la Philharmonie jusqu’à fin août retrace le parcours d’un groupe atypique, décrié de tous mais renié d’aucun. Un groupe qui, bien qu’adoubé par Warhol (et sa Factory), ne l’a pourtant pas attendu pour se forger un univers, une identité en rupture totale avec les canons du rock de l’époque. Sa poésie aborde de front le sexe, les drogues, les questions existentielles sur une musique à la fois schizophrène et fluide, sombre et lumineuse dont les paradoxes et extravagances obligent l’implication. Expérience auditive soumise d’ailleurs de manière fort originale au public pendant l’exposition où les visiteurs sont invités à s’allonger les uns à côtés des autres dans une cabane en bois diffusant des images psychédéliques au son de Sunday morning, I’m waiting for the man, Femme fatale, Heroïn et autres petits bijoux « Velvetien ».
Une expo immersive et complète (près de 3 heures pour en venir à bout avec déjà le regret de s’en échapper) qui donne aussi à voir de vieux journaux, de multiples extraits de films d’art underground et d’archives télévisuelles, des centaines de photographies noir et blanc prises par des témoins de la carrière éclair du groupe (Nat Finkelstein, Donald Greenhaus, Gerard Malanga…), des portraits et œuvres d’artistes contemporains. Une exposition qui projette le visiteur dans un ailleurs, celui du Velvet Underground. Les amateurs apprécieront vraiment, les néophytes découvriront avec plaisir.
<< Nico et Lou Reed au Castle à Los Angeles, mai 1966 © Lisa Law
<<< The Velvet Underground à Los Angeles, mai 1966 © Gerard Malanga
<<<<Lou Reed, John Cale, Sterling Morrison © Stephen Shore, courtesy 303 Gallery, New York
The Velvet Underground au café Bizarre – 1965 © Adam Ritchie
The Velvet Underground au Trip Los Angeles – 1966 © Lisa Law
En savoir plus…
> Site Internet de la Philharmonie de Paris
Informations pratiques :
> Du mardi au jeudi de 12h à 18h
> Vendredi de 12h à 22h
> Samedi et dimanche : 10h à 20h
> Tarif plein : 10€
> Philharmonie de Paris – 221, av Jean jaurès 75019 Paris / Métro : Porte de Pantin
> Autour de l’expo, les concerts : ici
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