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L’amour sera convulsif ou ne sera pas

Un titre peu ordinaire pour une pièce extraordinaire où amour et folie se mêlent et donnent naissance à un voyage thérapeutique réellement étrange. Plusieurs « variations sur le même t’aime » teintées d’humour noir – véritable tourbillon émotionnel pour un spectateur conscient dès le départ qu’il va vivre un moment hors du temps – c’est ce que propose cette création originale, audacieuse et dérangeante de Jacky Katu. Compulsif l’amour? Non convulsif et il sera…décliné en chanson, déclamé en inventaire à la Prévert, enivrant comme une valse à 1000 temps. Rencontre avec un auteur passionnant.

Luzy : Votre pièce raconte l’histoire de six personnes  – trois hommes et trois femmes – internées dans un hôpital psychiatrique ayant un rapport problématique à l’amour et au sexe, pourquoi avoir choisi de parler d’amour au travers la folie des hommes?

Jacky Katu : J’aime l’amour sous toutes ses formes, l’amour du chocolat par exemple dont je ne peux pas me passer et qui chaque jour réduit à néant ma promesse de faire un régime.
Mais si l’on prend l’amour au sens conventionnel du terme, aimer un homme ou une femme en un mot, j’ai tendance à penser que l’amour, le sexe et la folie vont de pair. Peut-on parler d’amour rationnel ou raisonnable? Je ne le crois pas et je ne veux même pas y songer. Cela me paraît d’un ennui mortel. En tout cas ce n’est pas là ma conception de l’amour. L’amour rend fou ou doit rendre fou. C’est la moindre des choses et c’est tant mieux.

Luzy : L’amour rend fou donc…
Jacky Katu : Assurément l’amour rend fou. Sinon ce n’est pas de l’amour. Lorsque l’on est amoureux, nos émotions prennent le pas sur notre raisonnement et nous submergent. Cela peut nous conduire au suicide, au meurtre, à l’anorexie ou à la boulimie à l’aphasie et j’en passe et des meilleurs. Pas toujours heureusement. La folie peut aussi être joyeuse et nous faire voir la vie en rose comme dans la chanson d’Edith Piaf.

Luzy : Reconstitutions picturales, expression corporelle sur musique contemporaine, vocalises parlées ou chantées, vous faîtes réaliser à vos acteurs une foultitude de « variations sur le même t’aime » toutes aussi prenantes les unes que les autres avec une dextérité incroyable, d’où vous est venue l’idée? Était-ce pour marquer le côté convulsif de la souffrance ou le côté cathartique de la jouissance en amour? Les deux?

Jacky Katu : L’idée m’est venue naturellement si j’ose dire. La variation et les contraires sur un même thème stimulent ma sensibilité et mon écriture scénique. Multiplier les points de vue et les regards, utiliser la pluralité des disciplines artistiques, désorienter le spectateur est la seule manière de faire du « théâtre » pour moi.
Mais ce n’est pas a priori que j’ai décidé d’utiliser cette foultitude de variations sur le même thème pour marquer la souffrance ou la jouissance en amour. Ce n’est qu’après coup, en dernier lieu, une fois les textes écrits et le travail sur le plateau avec les comédiens qui ont beaucoup apporté au spectacle avec leurs folles improvisations, que l’axe de la pièce, pour autant que cela veuille dire quelque chose, et le titre surtout, m’est venu à l’esprit.

Luzy : Vos acteurs sont époustouflants de justesse, carrément habités, pouvez-vous nous dire quelques mots sur eux? Qui sont-ils?

Jacky Katu : C’est précisément pour cela que je les ai choisis, parmi des dizaines et des dizaines de comédiens que j’ai «castés». Du premier jour jusqu’au dernier jour des répétitions, ils ont toujours tout donné avec un enthousiasme délirant et une justesse confondante. Certains sont encore en formation dans des écoles de théâtre. D’autres sont de jeunes professionnels. Mais tous vouent à leur art une détermination qui me ravit et une folie qui n’est pas sans rappeler l’amour fou.

Luzy :  Une telle osmose demandant forcément complicité se connaissaient-ils avant de travailler sur ce projet?

Jacky Katu : Non, ils ne se connaissaient pas pour la plupart avant de travailler sur le projet. Mais dès le premier jour, dès leur première rencontre sur le plateau, ils ont tout de suite été complices comme par magie, ou plus précisément comme s’ils avaient eu le coup de foudre les uns pour les autres.
C’est pour cela sans doute intuitivement que je les ai choisis avec le fol espoir qu’ils s’entendraient comme larrons en foire. Et ma prophétie s’est réalisée. Une fois n’est pas coutume !

Luzy : L’un d’eux d’ailleurs assure une prestation vocale vertigineuse presque en apnée en confessant ses amours et ses rapports intimes, comment se cale une telle prouesse pour éviter le dérapage?

Jacky Katu : Il s’appelle Mathieu Petriat. Si je lui ai confié d’emblée ce texte impossible à dire de cette façon vocale vertigineuse à donner le tournis, c’est qu’il était le seul à l’évidence à en être capable. Dès la première fois qu’il a dit ce texte, il l’a dit sans hésiter, sans se poser aucune question, de cette façon là avec un naturel confondant, comme s’il n’y avait pas d’autre maniére de le dire. Et pas une seule fois par la suite, il n’a « dérapé. Confesser ses amours et ses rapports intimes de cette façon là lui paraît naturel. Comment fait-il? Le sait-il lui même? Cela reste mystérieux !

Luzy : Vous avez sans doute conscience que par les thèmes qu’elle aborde votre pièce peut parfois déranger, vous l’avez jouée pour la première fois au festival d’Avignon l’année dernière, comment a-t-elle été accueillie? Avez-vous déjà essuyé des remarques hostiles?

Jacky Katu : Pour moi, c’est le propre du théâtre de déranger. A quoi bon venir au théâtre si c’est pour voir la même chose que regarder un jeu de Nagui devant sa télévision. Mais déranger ne veut pas dire indisposer, incommoder. J’espére que le spectateur prend plaisir à voir le spectacle, pour ne pas dire « jouir » du spectacle.
Pour ce que j’en sais, la pièce a été très bien accueillie au festival Avignon. Les spectateurs qui m’en ont parlé étaient en général enthousiastes. Mais cela ne veut pas dire que certains n’ont pas critiqué le spectacle, voire le dénigrer ou le condamner vertement. Mais ils n’ont peut-être pas osé venir me le dire ouvertement, ou bien encore ont-ils considéré que la pièce était tellement insignifiante et stupide, écrite et mise en scène par un analphabète, que cela ne valait pas la peine de perdre sa salive pour si peu de choses.

Luzy : Parlez nous de vous maintenant, qui êtes-vous? Etes-vous un homme de théâtre?
Jacky Katu : Qui suis-je? A vrai dire je n’en sais rien et cela ne m’intéresse pas de le savoir pour autant que cela soit possible. Mais factuellement, j’ai d’abord été chercheur au CNRS comme anthropologue avant de commencer à faire du cinéma (« Fais-Moi rêver », « Do Me Love », « 4.48 », etc.) et du théâtre à la Maison des Métallos à partir de 2005 (Secousses Internes, Les Anormaux, Errance, Asile, Sauve qui peut la vie).

Luzy : Quelques mots sur vos projets futurs?
Jacky Katu :Trois projets au théâtre qui me tiennent particulièrement à cœur :
Faire une adaptation théâtrale du dernier livre de mon très cher ami philosophe Ruwen Ogien « Philosopher ou Faire l’amour ». Continuer à travailler avec les comédiens que vous avez vus sur scène sur le thème de la prison dans le même esprit que celui de « L’amour sera convulsif ou ne sera pas ». Commencer à préparer une pièce-matériau « A 3537 » sur le thème de la Shoah, inspirée du livre de Ruth Kruger « refus de témoigner ».
Et des projets au cinéma :
« Le premier et le dernier jour de la vie d’un couple »
« Sans toi » : ou comment survivre à la mort subite de sa petite fille.

 


PLACES A GAGNER

Et parce que cette pièce est fascinante, je vous propose de gagner 2 places pour vous rendre au Théâtre de Ménilmontant au choix les 6, 7 et 9 mai 2015. 2×2 places sont à gagner pour chacune de ces dates, ce qui fait en tout 6 gagnants qui pourront s’y rendre avec la personne de leur choix. Si vous êtes intéressés merci de laisser un commentaire en bas de page en précisant bien la date à laquelle vous souhaiteriez voir la pièce. Un tirage au sort sera effectué parmi les participants le 3 mai.

 

L’amour sera convulsif ou ne sera pas
Au théâtre de Ménilmontant
15 rue du Retrait
75020 Paris / Métro Gambetta
A 19h00
Les 23, 24, 25 avril et 6, 7, 9, 13, 25 et 27 mai 2015

Commentaires

  1. Avatar de Becouarn

    Bonjour, je serais interessée pour aller voir cette piece qi possible le 13 Mai… Metci beaucoup 🙂
    Elea.

  2. Avatar de MHF

    J’y suis allée hier, j’ai bien aimé dans l’ensemble… 😉

  3. Avatar de MR

    Je suis intéressée pour aller voir la pièce le 9 mai. Merci pour la proposition.

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