Qui n’a jamais rêvé de ramener à la vie un être cher, même rafistolé, même un peu bancal, un brin étrange, par-delà la différence? Qui n’a jamais imaginé que le progrès scientifique remplisse ses promesses émancipatrices de modernité au point qu’il soit alors possible grâce à de simples décharges électriques savamment orchestrées mais aussi beaucoup de volonté et d’amour de réanimer corps et âme d’un proche disparu?
Frankenweenie, porte le mythe du Professeur Frankenstein, Tim Burton ayant été jusqu’à donné le prénom de Victor au petit garçon auquel il dit aisément s’identifier. Toute la question étant qui du créateur ou de sa créature est le plus monstrueux? L’auteur ne choisit pas son camp, ne place même pas le problème à ce niveau là lorsqu’il s’agit de redonner vie à « Sparky » le chien malin. Seule résonne en lui toute la question de la condition tragique des êtres vivants voués à s’éteindre (trop tôt?, bêtement?, cruellement?…) et de la révolte, du désespoir, de la solitude que cette perte peut engendrer pour ceux qui restent.
Toutefois, il tient à rappeler que les nobles choses se font par passion, amour de l’autre et de ce que l’on fait. Que seuls ces sentiments engendrent la beauté. Que tout progrès ayant pour objet le challenge, le pouvoir ou la haine peut conduire à des désastres irréversibles. Il n’oppose en rien raison et passion et préfère axer son propos sur le fait que le progrès scientifique utilisé à mauvais escient peut être désastreux.
Grand défenseur depuis toujours de la marginalité, Burton y aborde également et aussi brillamment que dans Edward Scissorhands (ce n’est pas peu dire) la difficulté à accepter la différence, ce dans un univers intemporel d’une inventivité incroyable où s’entremêlent cruauté et tendresse, poésie et sordide. Frankenweenie est une vraie pépite d’animation comme Tim ne nous en avait pas servi depuis un moment. Les adeptes du cinéaste y reconnaîtront aisément la patte de l’auteur : l’utilisation de la technique du stop motion comme dans Les Noces Funèbres, les formidables frimousses enfantines aux grands yeux mélancoliques limite « carnaval des fous » ainsi que les cimetières étranges, animés, ténébreux, inquiétants et pourtant paradoxalement presque « sécurisants » que l’on trouve dans l’Etrange Noël de Monsieur Jack, l’Amérique qui s’ennuie en zones pavillonnaires bien organisées dans lesquelles s’inscrit l’histoire d’Edward Scissorhands ou encore l’inénarrable tronche de Bela Lugosi réincarné en partie dans la peau du professeur de sciences.
Pour le plus grand bonheur des amateurs Frankenweenie marque enfin le retour du génial Tim Burton et semble ouvrir tout grand les bras d’un Burtonland tant attendu. Mais croyez-moi, ça en valait franchement la peine!
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