Je ne connaissais de Bukowski que sa réputation d’écrivain alcoolique et de vieil obsédé sexuel. Je garde aussi gravée à l’esprit les images d’anthologie de sa venue à l’émission littéraire « Apostrophes » où il fit un passage explosif.
En flânant à la FNAC il y a quelques temps, je suis tombée sur les « Contes de la folie ordinaire ». Interpellée par le concept même de folie ordinaire, je me suis laissée tenter par ce recueil de nouvelles. Car qu’est-ce que la folie ordinaire? Notre part de folie quotidienne? Notre part de déraison? La folie générée par nos peurs, nos angoisses, nos envies de vengeance ou encore de pouvoir? Celle que nous possédons au plus profond de nous et que nous tentons de refouler à chaque instant?
Je dois l’avouer, je n’ai d’abord pas du tout apprécié l’écriture de Bukowski, ses phrases lapidaires, ses mots crus et vulgaires avec toujours le sexe en toile de fond. Et les femmes, une vraie obsession. Les femmes belles ou moches, en rondeur, avec de longues jambes, castratrices ou soumises, dévoreuses d’hommes ou câlines. Un vrai défilé! Au départ, je ne voyais que nihilisme, envie de destruction, j’avais du mal à m’accrocher à cet univers sordide, déprimant fait de chambres d’hôtel cradingues, de draps sales, de culs et de puanteur
vaginale (en la matière je tairai l’histoire hallucinante intitulée le « Petit ramoneur » que je préfère vous laisser découvrir si le cœur vous en dit ).
Puis petit à petit je me suis surprise à m’attacher à ce personnage alcoolique et hideux (car Bukowski parle de lui dans ses nouvelles, et en ces termes en plus). Cet être qui dit détester la race humaine « triste spectacle que celui des foules empilées, des montagnes de viande qui jacassent, des carcasses répugnantes, des vies bradées, défilé de regards morts, de bouches mortes, tous des moignons… » mais qui au fond en parle souvent avec sensibilité et émotion (notamment lorsqu’il s’agit des femmes).
Cet homme qui sans nul doute compensait sa fragilité et sa peur de l’autre en dégueulant ses mots et son whisky sur autrui comme pour mieux se protéger. Bukowski cultivait l’humour noir, ironique et décalé avec beaucoup d’adresse. Il savait également pousser le ridicule des situations à l’extrême avec, je pense, une réelle volonté de mettre mal à l’aise et d’appuyer là où ça fait mal. Un auteur que l’on adore ou que l’on déteste mais qui ne laissera personne indifférent.
Voir l’extrait vidéo du passage de Bukowski dans l’émission « Apostrophes » :
Laisser un commentaire