Drôle de film que celui de Lvovsky! Emouvant, le spectateur oscille constamment entre rires et larmes. Déstabilisant, il y plane une certaine légèreté et pourtant en filigrane Camille redouble est l’histoire d’une dépression. Propulsée par miracle un soir d’ivresse dans l’espace temps de ses 16 ans Camille, quarantenaire désabusée et larguée par son amour de jeunesse, va revivre quelques heures de son adolescence : le lycée dans les années 80, Nena dans son walk-man, le quatuor infernal d’amies unies à la vie à la mort (la délurée, la coincée, la petite drôle, la révoltée intello), les premiers émois amoureux. Une tranche de vie pas si évidente dont pourtant beaucoup aimerait profiter à nouveau. Oui mais voilà, Camille la goûte en sachant déjà ce qui l’y attend, à savoir une mère admirée à la limite du pathologique qui sera cette même année victime d’un anévrisme puis la rencontre avec son unique amour qui pourtant 25 ans plus tard la trahira et fera de son présent une telle déception que le voyage dans le passé paraîtra la seule issue.
Noémie Lvovsky dans le rôle de Camille y est bouleversante. D’abord surprise par cette parenthèse enchantée où sa chambre d’ado tapissée de photos de Madonna et autre Cindy Lauper semble avoir été désertée la veille, où sa panoplie girlie des années 80 façon Cherche Suzanne désespérément colle assez peu avec son corps de quarantenaire (le parti pris de la cinéaste étant de se projeter dans le passé en conservant son apparence d’adulte), elle va très vite subir ce temps qu’elle essaye d’arrêter. Malgré ses tentatives infructeuses pour essayer de modifier la donne elle n’aura aucun impact sur une vie déjà écrite. La sobriété de mise en scène, la générosité du regard de Lvovsky sur l’histoire de Camille offrent des moments de pur bonheur, de ces instants magiques et délicats où l’on aimerait que le temps s’arrête. Chanter la Petite Cantate de Barbara en famille, faire jurer à ses parents retrouvés miraculeusement que jamais ils ne doivent mourir – et savoir pourtant que cette mort est imminente – s’empresser d’enregistrer la voix si douce de sa mère (que campe Yolande Moreau) pour en garder définitivement la trace.
Est
Camille redouble certes mais en ce cas précis savourons ce plaisir pour lequel il n’y a rien à redire.
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