Guédiguian traite la condition ouvrière en France comme Ken Loach sait si bien le faire en Angleterre. Et à chaque fois c’est juste, humain, touchant et surtout sans manichéisme. Robert Guédiguian je l’ai découvert avec Marius et Jeannette. Déjà dans ce film il portait un regard tendre sur sa compagne à la ville, la si sensible Ariane Ascaride. Déjà il abordait sans artifice la capacité au bonheur que peuvent avoir certains individus blessés par la vie qui malgré leur condition sociale difficile n’ont pas oublié d’enchanter le monde qui les entoure. Robert Guédiguian fait du bien. Je ne sais pas pour vous mais en ce qui me concerne la palette d’émotions allant du rire aux larmes que je peux ressentir devant ce qu’il nous raconte me laisse penser que je suis face à un grand.
Elles te feront un blanc manteau où tu pourras dormir, elles te feront un blanc manteau les neiges du Kilimandjaro cette chanson de Pascal Danel entonnée par les petits enfants de Michel et Marie-Claire pour leur 30 ans de mariage plante déjà le décor d’une vie familiale remplie de joie. Trop même peut-être. Au départ, je l’avoue je me suis demandée où cela allait nous mener? Car tout semble tourner rond dans le monde de Michel et Marie-Claire. Leur famille unie, leur conscience sociale aiguisée allant même jusqu’à ce que Michel (représentant syndical dans son entreprise) fasse partie de la vingtaine d’ouvriers tirés au sort pour être licenciés, ce dernier ayant volontairement glissé son nom dans l’urne par honnêteté. Bref, des gens simples vivant dans un cocon de respect et de tendresse. Et puis tout bascule, c’est le drame. Bien que socialement modestes, ayant trimé toute leur vie pour en arriver à se payer une petite maison sur les hauteurs de l’Estaque, les voilà violentés par la jeune génération ouvrière touchée de plein fouet par la crise qui voit en eux des « bourgeois engraissés ». Dénonciation, colère puis tristesse et réflexion, ils en arrivent à se demander comment il est possible d’être passé en si peu de temps de la lutte des classes à la lutte au sein d’une même classe. Qu’ont-ils de si différents ses jeunes ouvriers pour en arriver à de telles extrémités, à un tel paroxysme de violence envers des individus qui n’ont fait que se battre toute leur vie pour obtenir une bien maigre part du gâteau? Le chômage auquel ils ont à faire face au quotidien semble déjà être une réponse en soit mais pas que…face au chômage tout le monde ne devient pas un truand? Peut-être toutefois que la situation favorise cette forme de violence? En tous les cas chez Guédiguian personne n’est bon, personne n’est méchant, il n’y a pas de jugement. Il y a juste des individus avec leur vécu, leur conscience, leur plus ou moins grande générosité et leur capacité à pardonner qui se démènent pour vivre au mieux ou tout simplement pour survivre.
Un excellent Guédiguian, fort, juste, intelligent qu’à mon sens il ne faut pas rater.
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