Avoir le mal de mère. Plonger pourtant dans l’océan du haut d’une falaise jusqu’à ce que son cœur éclate. Cernée par l’absence et le vide, se sentir enfin sécurisée dans ce liquide amniotique duquel Elli n’aurait jamais voulu s’extraire. Elli, c’est Gueule d’Ange. 8 ans réels, 30 dans sa tête. Belle comme le jour, sombre comme la nuit. Un clair-obscur qui s’infiltre aussi sur pellicule, se glisse dans le jeu d’acteurs, pénètre dans les scènes de vie. Aux rires tantôt clairs tantôt jaunes, aux lumières pastel et accablantes du midi, au rose bonbon des gloss sucrés se juxtaposent le bleu nuit des fins de jours. La chute vers une réalité brutale. L’enfance sacrifiée. Regarder sa maman tomber et sombrer avec elle. De la même manière, en miroir de sa détresse. Shots de whisky, danses suggestives et maquillage outrancier deviennent le quotidien d’une enfant blessée par la vie, chahutée par des camarades d’école perplexes. En déshérence. Les nuits d’ivresse succèdent à l’ennui des jours mornes et ternes vautrées sur un canapé, couchées dans un lit. Et puis le choc, l’abandon. Marlène disparaît. Maman s’absente pour un temps indéterminé. Forcée de grandir, Elli renonce alors à l’innocence pour se couler dans la peau d’adulte qu’une mère a refusé de tenir mélangeant joliment sa solitude à celle d’un papa factice la prenant sous son aile.
Premier long-métrage de Vanessa Filho Gueule d’Ange aborde le thème de l’enfance meurtrie avec brutalité mais surtout sensibilité. Si certaines scènes paraissent peu crédibles, le film exsude pourtant la sincérité générant des émotions contradictoires et puissantes. Difficile de rester insensible au sort d’Elli magnifiquement interprétée par Ayline Aksoy-Etaix. Et si Marion Cotillard en fait des tonnes (comme a pu le faire Gena Rowlands en son temps) elle excelle, elle aussi, dans le rôle de la maman paumée.
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