Si l’on part du principe que M & Mme Rêve s’inspire du théâtre de l’absurde de Ionesco; que le théâtre de l’absurde s’inspire lui même des surréalistes et des dadaïstes; que la déstructuration du langage, la mise en exergue de la déraison du monde dans lequel l’humanité se perd en sont les fondements engendrant des situations burlesques, incohérentes d’une jouissance absolue (qui n’a vu ou lu La Cantatrice Chauve n’a jamais réellement flirté avec la dérision, c’est irrésistible!); si l’on ajoute à tout cela Marie-Claude Pietragalla, la beauté, la grâce, la créativité absolue ondulant son corps harmonieusement au même rythme que celui de son talentueux compagnon Julien Derouault : tous les éléments se combinaient prodigieusement pour faire de M & Mme Rêve le spectacle onirique d’expression corporelle le plus magique de l’année. D’autant que technologie 3D et décor interactif époustouflant réalisé par une équipe d’ingénieurs de Dassault Systèmes promettaient d’offrir au public une expérience visuelle unique combinant réel et imaginaire comme pour mieux parler à notre âme d’enfant.
Alors quoi? Que s’est-il passé dans cette salle sublime du Grand Rex pour que l’étincelle ne devienne flamme?
Pour commencer déjà l’absence de Pietragalla blessée, cédant sa place à Clairemarie Osta. Force est de constater que son arrivée en fin de représentation a créé la véritable ovation! Et puis, sans doute, le fait que le théâtre de l’absurde qui jongle avec le (non-)sens des mots, la parole absconse ne semble pas si transposable dans l’expression corporelle où l’on s’attend à juste titre à voir… de la danse harmonieuse, des mouvements de corps si ce n’est en synchronisation tout au moins en osmose ! Finalement sûrement rigueur, discipline, élégance termes presque antinomiques me direz-vous avec incongruité et incohérence. Là est d’ailleurs tout le paradoxe! CQFD.
Bref si M & Mme Rêve s’inspire de l’univers de Ionesco jouant savamment avec le temps qui s’égrène, les lieux qui vieillissent laissant les individus intacts, l’absurdité de la vie, son caractère répétitif et asphyxiant; si M & Mme Rêve insuffle également des ambiances Kafkaïennes, Fritz Langiennes, sur fond de Tchaïkovski ou de Wagner le tout mixé par Laurent Garnier, il n’en demeure pas moins que M et Mme Rêve(nt)…mais pas nous! Et bien que Pietragalla reste incontestablement pour moi une des plus grandes dames du monde de la danse, je me suis considérablement ennuyée à son spectacle avec un seul bémol tout de même l’incroyable scène finale où 2000 rhinocéros se synchronisent avec les danseurs au rythme de La chevauchée des walkyries de Wagner.
Déception.
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